Déclaration du Forum du Leadership Féminin

Le leadership et la participation effective des femmes doivent être des priorités nationales.

Nous, participantes et participants au Forum du leadership féminin en Haïti, qui s’est tenu à Port-au-Prince, le 31 janvier 2025, affirmons que le leadership et la participation effective des femmes sont essentiels pour changer les paradigmes politique, social, économique, culturel et environnemental de notre pays renforcer la démocratie et construire un avenir inclusif, durable et prospère.

Nous croyons que la présence très marginale des femmes dans les sphères décisionnelles prive la République d’un potentiel décisif et qu’il y a urgence de réformer.

Nous appelons à un engagement national et international pour l’éducation, la formation, la valorisation et le renforcement des capacités et l’autonomisation financière des femmes.  Une attention particulière doit être accordée aux filles, surtout celles issues des zones vulnérables, des communautés rurales, et les déplacés internes dans le contexte de crise humanitaire et sécuritaire actuel.

Nous insistons sur l’impératif de garantir une participation active et équitable des femmes dans tous les secteurs et dans tous les aspects de la gouvernance nationale et notamment dans le processus électoral sur le point d’être mis en branle, attendu que les élections constituent un élément déterminant dans le renforcement de la démocratie et de la cohésion sociale. Ce processus électoral doit être une opportunité unique de concrétiser les objectifs d’équité et de représentativité à travers l’élaboration d’un décret électoral qui doit comporter des dispositions sensibles au genre. Nous nous engageons à collaborer avec toutes les institutions concernées pour promouvoir un processus électoral inclusif, équitable et sécurisé pour les femmes.

Nous exigeons que l’article 17.1 de la Constitution de 1987 amendée qui reconnait le principe du quota d’« au moins 30 % » de femmes à tous les niveaux de la vie nationale, particulièrement dans l’administration publique doit être pleinement appliqué et renforcé dans la perspective de la réforme constitutionnelle à venir. La locution « au moins », choisie par le législateur, invite à aller plus loin, à viser une parité complète de 50 %, plus proche de la démographie réelle de la société haïtienne. Nous plaidons pour que cet article soit soutenu par des mécanismes concrets afin de garantir une mise en œuvre efficace et durable. Nous considérons que c’est une exigence constitutionnelle de dépasser la limite des 30%, en intégrant des politiques plus ambitieuses et des mécanismes concrets pour atteindre la parité.

Nous encourageons la mise en place de programmes d’accompagnement en faveur des femmes, l’accès aux ressources et opportunités nécessaires pour les préparer aux responsabilités politiques et décisionnelles, la création des synergies et le renforcement des réseaux qui les encouragent à participer activement  à la vie politique.

Nous soutenons que le combat contre les violences basées sur le genre, notamment les barrières systémiques, la violence politique et les contraintes culturelles, est extrêmement important et doit être continu. À ce combat doivent se greffer ceux pour une société plus inclusive, l’impulsion de politiques publiques en faveur des femmes, leur épanouissement professionnel, leur participation dans la politique, l’apport des nouvelles technologies dans leur bien-être.

Nous estimons primordial de garder en permanence un « foyer allumé » qui favorise des échanges d’expériences avec des femmes leaders ; de souligner la contribution exceptionnelle des femmes, tout le long de l’histoire, dans tous les domaines de la vie communautaire; de créer des pépinières pour demain ; de développer des discours et des savoir-faire qui ouvrent des perspectives aux femmes, de prévoir des mécanismes favorisant l’intégration des femmes de la diaspora ;  de promouvoir un leadership féminin éthique et axé sur une culture d’excellence, de transparence et d’intégrité

Nous lançons un appel solennel aux femmes afin qu’elles se mobilisent pour réclamer et prendre leur juste place dans la construction de l’avenir d’Haïti ; Pour qu’elles participent pleinement au processus de dialogue national et aux prochaines élections que ce soit en tant qu’électrices, candidates, observatrices, leaders. Nous appelons aussi à l’intégration pleine et entière des femmes de la diaspora, dont les expertises et apports représentent une richesse inestimable pour le pays.

Nous réaffirmons notre engagement collectif à œuvrer aux côtés du Conseil Électoral, des institutions républicaines, des autorités, afin de promouvoir des élections inclusives, justes et pleinement représentatives des idéaux d’égalité et de démocratie, à plaider pour une administration publique équilibrée, un secteur privé soucieux de la parité, à travailler à la déconstruction des idées reçues qui tiennent trop souvent les femmes éloignées des affaires publiques ou limitent leur ambition à exercer certains métiers.

Nous invitons les hommes à devenir des alliés stratégiques et engagés du leadership féminin. Leur soutien actif aux initiatives favorisant l’autonomisation des femmes et leur pleine participation à toutes les sphères de décision est indispensable pour transformer durablement les dynamiques sociales, politiques et économiques. Nous devons construire ensemble une société plus inclusive, équitable et prospère, où chaque voix compte et chaque talent est soutenu et valorisé.

Nous exhortons les plus hautes autorités du pays et l’ensemble des forces vives de la nation – institutions publiques, secteur privé, universités, médias, société civile, partis politiques et partenaires internationaux – à travailler ensemble pour libérer pleinement le potentiel des femmes au bénéfice du développement d’Haïti.

Les femmes sont « l’autre moitié du développement »[1]. L’avenir d’Haïti ne peut être bâti sans la contribution et la présence équitable des femmes dans toutes les sphères de décision.

Fait à Port-au-Prince, le 31 janvier 2025.

Au nom des participantes et participants du Forum des Femmes Leaders,

[1] Mireille Neptune ANGLADE, L’autre moitié du développement. À propos du travail des femmes en Haïti. Port-au-Prince, Haïti: Les Éditions des Alizés & Erce, 1986, 261 pp. Préface par Andrée MICHEL.